La pause déjeuner était terminée, et Roxan n'avait plus de cours théoriques. Elle patientait donc sur la rive du lac, qui se situait non loin du Dojo. Son cours de Kendô débuterait dans une demi-heure. Et entre nous, elle était plutôt pressée de commencer. Attendre sans rien faire, même devant un décor de carte postal, était d'un ennui mortel.
D'autres élèves du campus passaient par cette rive, simplement pour se promener, ce qui avait le don d’agacer Roxan. Elle n'aimait pas leur façon de la regarder, de la juger du regard. Etait-ce à cause de ses vêtements sombres et moulants? La jeune femme jugeait qu'elle avait le droit de se vêtir comme bon lui semblait, et puis, cela respectait encore le règlement du campus. Ca n'était pas si provoquant que ça.
Ou bien elle se faisait des films pour rien. Après tout, ces élèves ne se souciaient même pas d'elle, et la qualifiaient plutôt de "sans ami".
Roxan soupira. La solitude ne la dérangeait pas, au contraire. Les gens d'aujourd'hui dégageaient beaucoup d'ondes négatives, notamment à cause du stress. Les partiels, bah, elle se fichait bien de les rater. Elle était une warrior, pas une intellectuelle. Elle s'étira, et se dirigea vers un banc pour s'y poser quelques minutes. Si elle restait debout durant la demi-heure de pause qu'il lui restait, elle aurait les jambes fatiguées avant même de commencer l'entrainement de Kendô. Un banc près d'un arbre, c'était parfait, sa peau laiteuse ne subirait pas le harcèlement des rayons du soleil.
Elle s'y installa, posa son sac à côté d'elle et sortit un livre que lui avait demandé d'acheter son professeur de français. En dehors du Kendô, Roxan n'avait pas eu d'autre choix que décider d'une filière théorique, et bien qu'Australienne d'origine, elle avait choisi le français. Cette langue élégante n'était pas facile à apprendre. Elle possédait de nombreux homonymes, qui ne voulaient pas dire la même chose. Mais comme cela faisait deux ans qu'elle étudiait la langue, elle pouvait communiquer avec tous les élèves français, malgré son fort accent anglais.
Son livre était une oeuvre de Choderlos de Laclos, Les Liaisons Dangereuses. Couverture rose, épaisseur inquiétante. Les premières pages n'avaient pas l'air palpitantes. Aucune histoire d'amour n'était palpitante. Mais la quatrième de couverture offrait un résumer assez intéressant en lui-même. Cela promettait maintes tromperies et autres manipulations. Quelque chose de psychologique, en somme. Dommage, pour la jeune femme qui préférait les romans fantastiques. Elle devra s'en tenir à ça pour la moitié du semestre.
Soudain, elle sentit quelqu'un s'approcher, alors que plus aucun élève ne trainait dans le coin. Elle ne se retourna pas, mais resta vigilante, faisant semblant de ne rien avoir entendu...